Vouloir  n’est pas toujours Pouvoir, Par Moustapha Samb

Le Président Macky Sall n’a pas finalement honoré son engagement de réduire son mandat de 7 à 5 ans. Constat amer s’il en est, pour ceux qui n’avaient pour œil que la réduction du mandat en cours, une vision réductrice de la démocratie qui va au-delà des luttes et compétions politiques liées à des stations ou des postures de gouvernance.

Une démocratie ambitieuse doit aller au-delà et chercher à améliorer le fonctionnement des institutions en élargissant  le consensus  autour des  acteurs de notre landerneau politique et même au delà.  Il faut donc que nos gouvernants, surtout ceux qui sont au pouvoir, fassent encore des efforts pour asseoir un vaste cadre de concertation qui prend en charge l’ensemble de la classe politique, opposition comme pouvoir pour transcender certaines divergences et harmoniser leurs positions sur les grandes questions qui interpellent la Nation. Au demeurant, si le Président Macky Sall pouvait réduire son mandat par lui-même, il n’allait jamais passer par le Conseil Constitutionnel dont il sollicite le quitus comme cela se  doit  dans tout Etat de droit.

La question qui se pose à nous est de savoir si est-ce que le Président pouvait passer outre la décision  du Conseil  Constitutionnel ?  Question délicate pour ne pas dire difficile, vu la position du Conseil dans l’arsenal juridique de notre pays, un rôle de garde- fou et d’intronisation puisque c’est devant elle qu’on jure, pour tous ceux qui ambitionnent de diriger ce pays. Le Président peut-il ignorer le Conseil constitutionnel et revenir prêter serment devant cette institution ? Ce serait un précédent dangereux dans la fragilisation de nos institutions et un abus de pouvoir du Président de la République qui cesserait d’être un modèle pour ce qui est du respect de la République et des institutions qui l’incarnent.

Ce serait une infantilisation de notre démocratie parce qu’une démocratie sans institutions fortes est une démocratie infirme pour ne pas dire bananière.  Je ne suis pas juriste, mais le peu que je connais en droit m’a appris que la jurisprudence de notre pays en matière de réformes constitutionnelles n’a jamais pris en compte les mandats en cours dans l’application de la nouvelle loi.

Depuis Senghor, c’est ce que nous constatons, à chaque fois qu’il y a réforme institutionnelle, le mandat en cours est toujours épargné. Cela m’étonnerait d’ailleurs que le Conseil Constitutionnel  se dérobe de cette tradition juridique consacrée pour emprunter une autre voie. Nous étions tous pour les 5 ans sans trop réfléchir sur les mécanismes juridiques qui y mènent. On avait oublié que la loi était impersonnelle et ne gère pas la morale ou les états d’âme d’un citoyen, fut il prestigieux comme un Président de la République.

Pourtant, la réforme telle qu’elle sera soumise au peuple aura un effet sur l’actuel Président si et seulement si son mandat est renouvelé. Il ne pourrait faire qu’un seul mandat de 5 ans. Le Président Macky Sall ne pouvait pas délibérément fouler au pied l’avis du Conseil Constitutionnel.

Pour nous, qui l’avons connu et pratiqué, en 2012, au moment où on se battait contre un troisième mandat de Wade, il a été le premier à jeter l’éponge, au point de nous frustrer, disant qu’il se plie à la décision du Conseil et que pour lui la lutte contre un troisième mandat de Wade est terminée. Je vois donc  un homme,  très attaché à la loi au point d’en être un conservateur incapable d’ignorer une décision d’une haute juridiction de la dimension du Conseil Constitutionnel.

Le Conseil lui dit: «La loi ne vous donne pas droit pour ce qui concerne la réduction de votre mandat en cours à consulter le peuple. Il faut enlever cette disposition du référendum que vous comptez soumettre au peuple puisqu’elle est anti constitutionnelle ».

Un Président a beau vouloir poser des actes, faire des réformes consolidantes de notre démocratie mais il ne peut le faire que dans le cadre de la loi et des principes généraux de droit de notre pays. S’il passe outre, il devient un danger potentiel pour notre peuple et il ouvre la voie aux autres apprentis dictateurs qui un jour, pourraient accéder à la magistrature suprême et tenter d’augmenter leur mandat au mépris total des juridictions de notre pays.

A la place donc des invectives, privilégions le dialogue et la concertation pour faire de notre pays une démocratie majeure.

Pr Moustapha Samb

Prad Sénégal-  Macky 2012

tafasamb@yahoo.fr

5 COMMENTAIRES
  • paco
  • lebaolbaol tigui

    Ce qu'il a fait ca s'appelle mentir chez nous ! niit ku diup du diguee lumu momul 4 ans…beuy weesna mbuss………..ce mensonge est premeditè !

  • Ndongo

    Quelle mauvaise foi! Macky a dit et s'est dédit. There's no other way to look at it. Sanctionnons le dans les prochaines législatives avant d'en finir définitivement avec lui en 2019.

  • dioufel

    tout a fait d accord opposants ne soyez pas presses le respect des institutions est capital nous vous demandons vous aussi de respecter la loi une fois au pouvoir au Senegal nous voulons une democratie forte

  • abou sy

    Bien dit Mr Samb et bravo sur vos arguments bases sur le droit

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