La Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a présenté un nouveau cadre réglementaire visant à renforcer le contrôle sur les flux financiers extérieurs. Lors d’une rencontre semestrielle tenue au siège de la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Dakar (CCIAD), les organisations patronales sénégalaises ont été informées des nouvelles dispositions destinées à assurer un rapatriement plus systématique des recettes d’exportation.
Selon les informations rapportées par Sud Quotidien, cette mesure répond à un constat préoccupant : en 2024, 24,2 % des recettes issues des exportations sénégalaises hors zone UEMOA n’ont pas été rapatriées. Ce manque à rapatrier, qui représente 3,5 % du Produit Intérieur Brut (PIB) du pays, survient dans un contexte où les exportations ont pourtant connu une hausse de 30,5 %, notamment grâce au pétrole de Sangomar et à l’or non monétaire. Pour François Sène, directeur national de la BCEAO, il s’agit d’un « enjeu de souveraineté financière », car ce déficit pèse sur les réserves de change et la capacité à financer les importations essentielles ainsi que le service de la dette extérieure. Ce contexte de vigilance financière accrue intervient alors que les vulnérabilités économiques au sein de l’UEMOA font l’objet d’une attention particulière, notamment concernant l’exposition des marchés régionaux aux chocs financiers.
Le nouveau règlement N°06/2024, qui est entré en vigueur, impose un triptyque strict aux entreprises exportatrices : la domiciliation de toute exportation dépassant un certain seuil, l’encaissement de la totalité des recettes dans les délais impartis et le rapatriement des devises auprès d’une banque locale. De plus, il est fait obligation à tout résident de céder ses devises à la BCEAO. Une exception est accordée aux banques, qui peuvent conserver jusqu’à 20 % de leurs recettes en devises pour leurs opérations courantes. Des progrès ont cependant été notés, avec une augmentation du taux de domiciliation et d’encaissement ces deux dernières années.
La surveillance des comptes en devises, qu’ils soient détenus localement ou à l’étranger, est également intensifiée. Leur ouverture est désormais soumise à un avis conforme de la BCEAO et leur utilisation est strictement limitée. Le règlement précise aussi que les travailleurs expatriés sous contrat de plus d’un an acquièrent le statut de résident, impliquant que leurs salaires doivent transiter par un compte en francs CFA. Pour garantir l’application de ces règles, un dispositif de sanctions est prévu, avec des amendes pouvant atteindre le double du montant de l’infraction. Abdoulaye Sow, président de la CCIAD, a souligné que « une meilleure maîtrise des flux financiers extérieurs renforce la crédibilité de nos entreprises » et rend le Sénégal plus attractif pour les investisseurs étrangers.
