Le corps de Mia sujet de réflexion philosophique / Sanoussy et Domingo dialoguent
En écho au papier écrit par le journaliste et philosophe Bacary Domingo Mané, sur la prestation de Mia Guissé dans une tenue suggestive en Italie, moulant un corps presque nu et qualifié de «corps sublimé » par l’éditorialiste, le professeur de Philosophie et chroniqueur, Mamadou Sanoussy Ba apporte sa réplique. Pour lui, c’est plutôt l’âme de Mia qui est prisonnière de son corps. Par conséquent la jeune artiste n’a plus de repère, dit-il.
Mia et le corps sublimé !
Par Bacary Domingo MANE
De nombreux internautes n’ont pas caché leur colère et dépit, à la suite de l’apparition, de l’artiste Mia[1], sur scène, en Italie, enfilant une combinaison moulante, accompagnée d’une chorégraphie suggestive. Le paradoxe est que, l’habit censé couvrir le corps, le dévoile et le rend accessible à tout regard.
En dehors de toute approche morale, moraliste et moralisante, la réaction des internautes peut être assimilée à un regard décalé que le puritain pose sur un corps dont il a du mal à accepter la transformation. Un regard imprégné de certaines valeurs morales telles que la pudeur et la retenue. Surtout pour celles et ceux qui l’ont connue avant et nostalgiques de son habillement, assorti, parfois, de voile.
En réalité, ce qu’ils ne pouvaient appréhender, c’est le jeu double de l’artiste derrière le voile. Sur la scène italienne, Mia est apparue aux fans telle quelle, sans fard, dans une «authenticité», parfois, débridée. L’artiste «tue» le réel pour laisser survivre le personnage.
Ce corps qu’elle expose aux regards des fans et autres internautes n’est que le corps sublimé de la star. Celle qui doit son existence qu’aux projecteurs et se définit qu’à travers le regard de l’autre. La star est prête à tout pour maintenir cette relation symétrique, cette attention contagieuse. Elle se fera plus belle, plus captivante sur scène, et entrer dans une logique de désincorporation où le corps est réduit à un «assemblage» de chair. La faute à l’industrie culturelle[2] !
Mia a goûté à la saveur de la célébrité voulue et recherchée (différente de celle qui vous tombe dessus). Mais cela se fera au prix de la dépossession de son corps. La star court le risque d’être réduite à l’état de produit à la valeur variable et volatile[3].
Ce corps du showbiz a un prix et sa valeur monte lorsqu’il se dénude, se dévoile, parfois, jusqu’à l’obscénité. Il faut alors choquer, provoquer pour susciter la polémique et être au centre de toutes les attentions. Dans sa volonté insatiable de maintenir la courbe de la célébrité, la star est victime de la perte de limites. Elle n’a plus d’intimité et ne ressent aucune pudeur. Les piliers de son identité sont soufflés par la logique mercantiliste.
Qui sait ? Mia pourrait, comme l’ont fait certaines célébrités du Showbiz et du sport, faire assurer une partie du corps sublimé. Comme Mariah Carey qui a fait assurer ses jambes à 695 millions d’euros. C’est le cas aussi pour Cristiano Ronaldo qui a déboursé 100 millions d’euros pour ses jambes[4] etc.
Le comportement transgressif du corps-objet, soumis aux regards, parfois, espiègles des fans, vise à pulvériser les records du marché boursier. Plus l’artiste expose son corps d’emprunt, plus il se soumet à la violence symbolique et devient ainsi l’attraction.
Et si ce corps livré aux regards cachait un mal-être ? Le corps sublimé devient alors un instrument pour faire face aux adversités. Peut-être que Mia veut prendre sa revanche sur la vie ? C’est pourquoi le regard qu’elle-même pose sur son corps n’a pas la même portée que celui des internautes choqués. Sa réaction en dit long.
Elle était dans un corps d’emprunt, le temps d’une prestation. Mia retrouvera, son vrai corps, le corps réel[5], dans l’intimité de sa chambre.
Bacary Domingo MANE (Mondeafrik.com)
[1] Signification et Etymologie du prénom Mia : dérivé du prénom Marie, ou de la contraction du prénom Myriam. La forme ancienne de ce dernier signifierait « cher », « aimé ». Personnalité : dotée d’une énergie et d’une audace à tout rompre, sans compter sa forte personnalité. Elle n’hésite pas à jouer de ses capacités de séduction pour obtenir ce qu’elle souhaite. Source : https://www.parents.fr/prenoms/mia-49755
[2] Concept créé par l’Ecole de Francfort et qui explique qu’une grande part des rapports entre les hommes est basée ou régie par des processus économiques où la consommation et les volontés des entreprises deviennent des phénomènes de société.
[3] Laurent Muldworf, Conférences de Sainte -Anne, lundi 13 Mai 2019
[4] Combien vaut le corps des stars du sport et du showbiz ? article publié par L’Expansion.com, le 16/11/2010
[5] Sadio Mané : La revanche du corps réel (https://mondeafrik.com/2022/11/24/sadio-mane-la-revanche-du-corps-reel)
… C’est plutôt l’âme de Mia qui est menacée
Par Mamadou Sanoussy Ba, philosophe- chroniqueur.
« MIA et le corps sublimé », tel est le titre de l’article du philosophe- journaliste, Bacary Domingo MANÈ
L’auteur y fait passer à la loupe, ce que mon professeur de philosophie, feu Aloïse FAYE, appelle » la dialectique du montrer-cacher »
Le prétexte de DOMINGO est MIA, la chanteuse Sénégalaise sur scène, en Italie, habillé en moulante, habillée nue ou nue habillée.
Le texte de BDM se conclut en ces termes : » Mia a goûté à la saveur de la célébrité voulue et recherchée (différente de celle qui vous tombe dessus). Mais cela se fera au prix de la dépossession de son corps. La star court le risque d’être réduite à l’état de produit à la valeur variable et volatile. »
Certes, le risque d’être une femme-objet est réel. Mais, pire, le risque que court la star est la miniaturisation de son âme. Oui son âme devient prisonnière de son corps exposé et sublimé
Dans un des best films de Hollywood, L’AVOCAT DU DIABLE, le personnage principal, incarnant Satan, se vante ainsi ; «on aiguille tellement les corps humains qu’ils pourraient fissionner n’importe quel atome de leurs désirs acérés, on rend bandant les rêves les plus tartes à force de billets verts de plaquettes, jusqu’à ce que l’âme humaine soit noircie et que les tabous soient piétinés ».
Le monde du showbiz dépasse la perspective de chosification du corps humain. Son dessein machiavélique va beaucoup plus haut et plus loin : Elle vise ce que le philosophe feu Habib MBAYE appelait le «dépôt sacré que Dieu a mis en chacun d’entre nous et dont chacun aura à rendre compte».
MIA sur scène, c’est la preuve d’un certain oubli, oubli d’une tradition qui va de Socrate à Ahmadou BAMBA et autres; tradition qui enseigne que le corps est le tombeau de l’âme: triomphe de l’ordre matériel sur l’ordre spirituel.
Ainsi, contre toutes les formes de suralimentation du corps, qu’il nous soit permis de rappeler ces propos de Socrate : « Ne donnez pas le pas au corps, travaillez plutôt avec ardeur pour le perfectionnement de votre âme ».
Pour terminer paraphrasons Zarathoustra : les oreilles de l’homme moderne, les oreilles du show-biz sont-elles faites pour le sens de ces paroles prophétiques ?
Mamadou Sanoussy Ba, philosophe- chroniqueur.