L’État sénégalais met l’accent sur la transparence dans l’acquisition d’équipements militaires pour les agents des Eaux et Forêts ainsi que pour les agents des Parcs Nationaux, une transaction représentant une somme de 45 milliards de francs CFA. Lors du Conseil des ministres, le Premier ministre Ousmane Sonko a mis en avant l’urgence d’auditer les importantes ressources financières allouées par l’État pour renforcer la Direction des Eaux et Forêts, de la Chasse et de la Conservation des Sols (DEFCCS), en particulier celles destinées à l’achat d’équipements de sécurité, de véhicules d’intervention et de matériel technique.
L’affaire, qui avait déjà attiré beaucoup d’attention, implique des personnalités de premier plan du régime du président Macky Sall, notamment l’ancien ministre de l’Environnement, Abdou Karim Sall, le ministre du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, et l’homme d’affaires Petit Boubé. Le contrat d’armement, signé par l’État sénégalais en début d’année 2022 avec des trafiquants étrangers controversés, sera audité. Lors du Conseil des ministres du 29 mai, le Premier ministre Ousmane Sonko a déclaré : « a souligné l’urgence de procéder à l’audit des ressources financières importantes mises en place par l’État pour la montée en puissance de la Direction des Eaux et Forêts, Chasses et Conservation des Sols (DEFCCS), en particulier celles destinées à la fourniture d’équipements de sécurité, de véhicules d’intervention et de matériels techniques. »
Ce contrat, dévoilé par les journalistes du consortium OCCRP, a une valeur de 77 millions de dollars US (45 milliards de francs CFA) et met en scène une société locale dénommée Lavie Commercial Brokers, créée deux mois avant la transaction. Cette société appartient au businessman nigérien Aboubacar Hima, alias « Petit Boubé ». Toutefois, c’est l’Israélien David Benzaquen, ancien employé du marchand d’armes israélien Gaby Peretz, qui a signé pour le compte de l’entreprise de « Petit Boubé ».
Gaby Peretz est un ami proche de l’ex-président sénégalais Macky Sall. Selon le magazine Africa Intelligence, durant les transactions, M. Peretz a offert une ligne de crédit de 300 millions d’euros (environ 196 milliards de francs CFA) à l’armée sénégalaise. Deux officiels du gouvernement sénégalais de l’époque avaient signé le contrat : Abdou Karim Sall, ministre de l’Environnement et du Développement durable (MEDD), et Abdoulaye Daouda Diallo, ministre des Finances et du Budget (MFB).
En juin 2023, Aboubacar Hima, alias « Petit Boubé », se trouvant à Dakar, avait confié à Jeune Afrique concernant les accusations de corruption et de surfacturation : « au Sénégal, le contrat court sur cinq ans, sans avance de l’État au démarrage. Qui va accepter cela, attendre des années pour être payé, à part moi ? On parle de surfacturation, mais que fait-on des risques, des intérêts bancaires à payer, etc. »
Officiellement, le stock d’armement devait être constitué d’armes (fusils d’assaut, pistolets semi-automatiques, etc.) et de munitions diverses pour les agents travaillant dans le secteur de l’environnement et confrontés à des groupes criminels divers. Des développements récents ont révélé des éléments nouveaux dans l’enquête autour du contrat d’armement conclu le 30 décembre 2021 entre le ministère de l’Environnement et Aboubacar Hima. Une enquête des renseignements financiers sénégalais a mis en lumière des mouvements de fonds suspects entourant ce contrat d’armement.
Selon le journal Libération, le contrat a été signé, au nom de Lavie, par David Benzaquen. Les renseignements financiers sénégalais ont souligné des mouvements de fonds troublants autour de « Petit Boubé » qui suggèrent le versement de présumés pots-de-vin. Ces informations figurent dans un rapport que la CENTIF a transmis discrètement au procureur. En plus de Lavie Commercial Brokers, Petit Boubé avait ouvert deux autres comptes au Sénégal, dans la même banque, pour ses sociétés Technologie Service International (TSI) et Eurocockpit. Lavie et Eurocockpit ont effectué un virement de plus de 3 milliards FCFA à TSI. Ces fonds ont ensuite été transférés à l’étranger par divers moyens. En février 2023, des mises à disposition de 85 à 150 millions FCFA ont été effectuées au profit de D.A. Jacques et A. Loum, permettant à ces derniers de retirer les sommes en espèces. Loum a encore bénéficié d’une mise à disposition de 185 millions FCFA le lendemain. Ces opérations n’ont pas été justifiées selon les enquêteurs. Petit Boubé a lui-même retiré des chèques pour un montant total de 565 millions FCFA.