Faits de terrorisme : Les expertises disculpent le guide religieux Cheikh Alassane Sène, le procureur demande son acquittement

La chambre criminelle de Dakar a examiné, ce vendredi 21 novembre 2025, une affaire sensible mêlant accusations de terrorisme, menaces et manipulation présumée. Deux hommes étaient poursuivis : le guide religieux Cheikh Alassane Sène, domicilié à Ouest-Foire, et Salif Hamady Ba, alias « Hamdel », jugé par contumace. Ils répondaient des charges d’association de malfaiteurs, menaces de mort et acte terroriste par intimidation.

Arrêtés en 2015 après l’envoi d’un message menaçant aux autorités sénégalaises, les deux mis en cause avaient passé treize mois en détention avant d’obtenir une liberté provisoire. Dix ans plus tard, seul Cheikh Alassane Sène a comparu à la barre, rapporte Seneweb visité par Senego.

Un SMS menaçant au cœur de l’affaire

Les faits remontent au 15 janvier 2015. Ce soir-là, un message envoyé aux numéros du ministre de l’Intérieur et de la Directrice de la Police nationale affirmait : « Vous avez commis des erreurs graves sur l’affaire Charlie… Nous sommes 19 membres d’Al-Qaïda à Dakar… La menace vous concerne, vous et vos enfants. »

Grâce à l’IMEI du téléphone utilisé, la police remonte jusqu’à une vendeuse de poisson nommée Diary Dia, qui dit tenir l’appareil de son cousin, Salif Hamady Ba. Après plusieurs contradictions, elle maintient cette version, confirmée par une tierce témoin. Une perquisition chez Hamady Ba révèle une carte SIM utilisée pour envoyer les SMS.

Mis devant ces éléments, Hamady Ba finit par affirmer que le téléphone lui avait été remis par Cheikh Alassane Sène, qu’il accuse d’être irrité contre le Président Macky Sall en raison de prises de position publiques. Selon lui, le guide religieux décidait alors de « passer à l’acte ».

Cheikh Alassane Sène démonte point par point l’accusation

À la barre, Cheikh Alassane Sène rejette fermement toutes les accusations : « J’étais surpris d’entendre mon nom dans cette histoire. Je n’avais pas les numéros impliqués. Je ne savais même pas qui était ministre de l’Intérieur à l’époque. Oui, j’ai publié sur Dakaractu, mais ce n’était pas une menace », avant d’ajouter : « Le message comportait énormément de fautes. Je suis un poète, je n’écrirais jamais cela. »

Il poursuit : « Je n’ai jamais offert ce téléphone. Amady Ba ne peut pas écrire un message structuré. Lors de la confrontation, il a dit avoir été aidé par son cousin », précise Allassane, avant d’accuser : « Ils ont voulu me piéger depuis le Palais de la République, parce que j’étais virulent. Je demandais au président Macky Sall de me rembourser l’argent que je lui avais prêté lors de la campagne présidentielle. » Il conclut : « Je ne suis pas l’auteur du message. Au moment de l’envoi, j’étais en communication avec mon père. On veut me faire taire. »

Les expertises téléphoniques semblent lui donner raison : aucune communication provenant de ses numéros n’a été localisée dans la zone d’où les SMS ont été envoyés. Au contraire, les données du téléphone de Hamady Ba coïncident parfaitement avec les antennes relais utilisées.

Cheikh Alassane Sène dénonce une instrumentalisation : « On voulait me faire taire. Je demandais au Président Macky Sall de me rembourser l’argent que je lui avais prêté pour la campagne. »

Le parquet demande l’acquittement du guide religieux

Face aux éléments d’enquête, le procureur reconnaît l’insuffisance de preuves contre Cheikh Alassane Sène et requiert son acquittement pur et simple.

En revanche, il demande une disqualification puis une condamnation de Salif Hamady Ba à 10 ans de réclusion criminelle pour acte terroriste par menace, estimant qu’il a cherché à se dédouaner en impliquant à tort le guide religieux.

Les avocats de Cheikh Alassane Sène dénoncent eux aussi une procédure fondée sur « des soupçons et des contradictions ».

L’affaire est mise en délibéré pour le 19 décembre 2025.