Analyse juridique et politique de la situation constitutionnelle au Sénégal suite à l’annonce du Président

Suite à l’annonce par le Président de la République du Sénégal de quitter ses fonctions au terme de son mandat le 2 avril, une situation d’incertitude politique et de questionnements juridico-constitutionnels a émergé. Pr Meïssa DIAKHATE, Agrégé en Droit public, et Dr Cheikh Omar Diallo, Docteur en Science politique, apportent leur éclairage sur les implications de cette décision et les solutions envisageables selon les dispositions constitutionnelles en vigueur et la science politique.
Vacance présidentielle et maintien en fonction
Les experts soulignent que, juridiquement, l’expiration du mandat présidentiel ne figure pas parmi les cas de vacance présidentielle énumérés limitativement par la Constitution ou le Code électoral. Ils argumentent que, selon l’article L.O. 137 du Code électoral, la vacance de la présidence ne peut être provoquée que par la démission, l’empêchement définitif ou le décès du président. Ainsi, le maintien en fonction du Président Macky Sall jusqu’à la tenue effective des élections semble juridiquement justifié, malgré l’absence d’une disposition expresse pour ce cas spécifique.
Conseil constitutionnel et décision sur la vacance
La possibilité de saisir le Conseil constitutionnel pour avis sur la question de la vacance à partir du 2 avril est discutée. Historiquement, des présidents, comme Léopold Sédar Senghor, ont opté pour une démission formelle sans saisir le Conseil. Cependant, la situation actuelle envisage une saisine pour avis, laissant au Conseil le soin de rendre une décision qui s’imposerait à tous, illustrant la complexité de la situation et le rôle crucial du Conseil dans sa résolution.
Implications politiques et processus électoral
L’incertitude actuelle découle en partie de la non-conformité aux délais constitutionnels pour la tenue des élections, exacerbée par les interprétations divergentes de la Constitution et le calendrier proposé par les acteurs du Dialogue national. Cette situation met en lumière les défis liés à la gouvernance et la nécessité de respecter scrupuleusement les dispositions constitutionnelles pour assurer la stabilité politique.
Suppléance présidentielle et autorité compétente
Concernant la suppléance en cas de vacance, la Constitution prévoit que le Président de l’Assemblée nationale assume la présidence. Toutefois, cette disposition ne prend pas en compte explicitement l’expiration du mandat comme cause de vacance, soulignant une lacune dans le texte constitutionnel. Cette situation appelle à une interprétation et une intervention possibles du Conseil constitutionnel pour pallier cette absence et garantir la continuité de l’État.
Perspectives et solutions juridiques
Face à l’inédit de la situation, les juristes proposent une réflexion sur les mécanismes constitutionnels de gestion des périodes transitoires et la clarification des processus de suppléance et de transition présidentielle. La nécessité d’une réforme constitutionnelle pour anticiper et encadrer de telles situations est également mise en avant, afin de renforcer la démocratie et la gouvernance au Sénégal.
La décision du Président de la République de quitter ses fonctions soulève des questions fondamentales sur la stabilité politique et la gouvernance constitutionnelle au Sénégal. L’analyse de Pr Meïssa DIAKHATE et Dr Cheikh Omar Diallo offre des pistes de réflexion juridique et politique
L’expiration du mandat n’est pas la cause de la vacance de pouvoir. L’expiration de mandat est un événement courant qui clos l’exercice du mandat d’un président élu, et qui intervient périodiquement (tous les 5 ans).
Il y a deux facteurs qui sont la cause de la vacance de pouvoir : l’absence d’un président élu et l’impossibilité du président sortant de demeurer à son poste. S’il y avait un président élu, il n’y aurait pas eu de vacance de pouvoir. En l’absence d’un président élu, si le président sortant pouvait rester à son poste au-delà du 2 avril, il n’y aurait pas eu de vacance de pouvoir. Finalement, l’empechement total ou definitif à poursuivre dans la fonction imposé par la constitution au président sortant apparaît comme le facteur qui cause la vacance de pouvoir.
Les commentaires sont fermés.