Affaire femme violentée à Sacré-Cœur : Horreur vidée à la barre

Fatou Ndoye, c’est la dame accusée de vol dans un magasin à Sacré-Cœur, ligotée, battue, déshabillée, tripotée puis filmée par ses présumés bourreaux. Et c’est ce vendredi 14 août qu’ils ont fait face au juge des flagrants délits de Dakar. Une affaire qui n’a pas encore livré tous ses secrets.

Les inculpés contestent…

Fatou Ndoye est une employée du Samu municipal et elle venait d’être, fraîchement affectée là-bas. Victime de d’attouchements, ses présumés bourreaux, Moussa Diallo, Ibou Thiaw et Babacar Ndiaye, risquent des peines allant de 1 à 5 ans de prison ferme avec une amende de 100 000 F, chacun pour collecte et diffusion d’images à caractère personnel, outrage public à la pudeur et attentat à la pudeur avec violences. Devant la barre, nous dit « Les Echos », les inculpés ont contesté lesdites infractions qui leur sont reprochées.

« C’est avec une corde qu’on l’a ligotée…« 

Ibou Thiaw a, pour sa part contesté avoir filmé la victime Fatou Ndoye. Toutefois, il reconnait l’avoir attachée. «J’ai assisté à toute la scène, au moment où on a interpellé puis attaché Fatou Ndoye à qui on a tripoté les seins. C’est une autre personne qui n’habite pas le quartier qui a palpé ses seins. Quand Abdou a soulevé son habit laissant apparaître ses seins, j’étais à ses côtés. Et quand il a voulu la déshabiller, je m’y suis opposé en lui disant que c’est une femme et on lui doit du respect. C’est Babacar Ndiaye qui a filmé la scène… Je fais partie de ceux qui ont attaché Fatou Ndoye. Si je savais que Abdou avait l’intention de la tripoter, je n’allais pas la déshabiller. Je ne sais pas comment la vidéo a atterri sur le net, je l’ai vue à la police. C’est avec une corde qu’on l’a ligotée», raconte-t-il.

« J’étais là-bas au moment où Abdou tripotait ses seins…« 

Toujours devant la barre, l’autre mis en cause, Moussa Diallo a reconnu avoir filmé la victime. Mais il conteste les autres chefs d’inculpation. «Ce n’est que son visage que j’ai filmé et non ses parties intimes. J’ai envoyé la vidéo à la patronne de l’atelier, Awa Camara. Et après cela, je l’ai immédiatement supprimée. J’ai transféré à Awa Camara parce qu’elle devait savoir tout ce qui se passait là-bas, vu qu’elle est la maîtresse des lieux. J’étais là-bas au moment où Abdou tripotait ses seins. Mais je leur ai demandé de la détacher après qu’ils l’ont ligotée», fait-il savoir.

Babacar Ndiaye, chef d’entreprise de son état, a reconnu lui aussi avoir filmé Fatou Ndoye. « Je l’ai filmée« , dit-il devant la barre. Avant de poursuivre : « Lorsque Abdou lui tripotait les seins, c’était en ma présence. Elle m’a craché dessus et je lui ai donné un coup de pied. C’est moi qui ai filmé la vidéo, mais je ne l’ai envoyée, ni montrée à personne. J’ai pris ces images pour juste la reconnaître après… »

Les confidences du père de la victime…

Le père de la victime, Malick Ndoye, lui aussi a témoigné. La voix mélancolique et tremblante. «Ma fille vit seule dans un studio qu’elle a loué. C’est au mois de Ramadan dernier qu’on a su qu’elle avait des problèmes psychiques. Un jour, elle m’a dit qu’elle ne dormait plus parce qu’elle entendait des voix et sentait des odeurs. C’est là qu’une de nos proches à Dakar l’a invitée à les rejoindre, mais elle a passé une nuit là-bas avant qu’on ne la conduise au camp Thiaroye pour des consultations. Elle s’est sentie mieux après et elle a même repris son service», raconte M. Ndoye.

«Le jour des faits, elle attendait tranquillement à l’arrêt leur voiture de service qui devait la prendre pour qu’elle parte au boulot. C’est là qu’elle a eu l’idée d’aller dans cette boutique pour acheter un boubou pour la fête de la Tabaski. Non seulement, elle avait 50 000F par-devers elle, mais aussi son chéquier. Depuis cette matinée, jour des faits, elle a rechuté et elle est internée au centre de santé Dalal Xel de Thiès depuis le 23 juillet, accompagnée de sa mère», s’est désolé le père de la victime.

Il poursuit : «Ce qui est déplorable, c’est ce qu’on lui a fait. Ma fille m’a révélé qu’on lui a fait des choses horribles dans la maison accolée au magasin. Elle a commencé à se remémorer des faits il y a une semaine. Elle se tord de douleur. On lui fait des massages mais jusqu’à présent, rien. Et les marques que lui ont laissées les cordes avec lesquelles elle a été attachée aux pieds et aux mains sont visibles. C’est 3 jours après les faits que j’ai su que ma fille a été violentée et malmenée.»

Plaidoirie des avocats…

«Ils l’ont ligotée, frappée et insultée. Pire, ils lui ont confié que cela aurait été mieux qu’elle aille se prostituer au lieu de voler. Le parquet devait même retenir les violences et voies de fait. Il y a violence physique et morale», a affirmé Me Tafsir Abdou Sy.

Pour sa part, Me Ndèye Anta Mbaye s’est indignée du sort de sa cliente. Elle a demandé une sanction exemplaire pour ses bourreaux. « Nous l’avons vu ligotée, malmenée et violentée. Et qui ne serait pas agressive quand une vingtaine de personnes se ruent sur vous? Ils ont estimé qu’ils devaient la corriger puisqu’elle était agitée. Quand on la maîtrise, pourquoi lui attacher les pieds et les mains? Ils l’ont conduite à l’arrière-cour puis déshabillée avant de la tripoter. Ces vidéos ont choqué tout le monde. Ces gens ont voulu se faire justice soi-même. Leur vengeance est un acte réfléchi, prémédité. Aujourd’hui, c’est la société sénégalaise entière qui se constitue partie civile…« , argumente-t-elle.

Avant de poursuivre : « Ces prévenus ont ligoté toutes nos femmes, tâté et tripoté nos seins. Ils ont soulevé nos boubous et violé notre intimité! Ces hommes nous rappellent ces temps passés où les femmes étaient des objets, à l’époque où on leur disait taisez-vous! Ouvrez-là! Fermez-là ! nous ne voulons pas de ces modèles pour nous filles et fils. Condamnez-les pour avoir pourfendu notre moralité ! Condamnez-les pour avoir souillé notre moralité. J’ai aujourd’hui vu un père meurtri avec des yeux imbibés. Qu’adviendrait-il si le père de Fatou Ndoye se venge? Les seins de sa fille sont sur les réseaux sociaux. Condamnez-les à la peine maximale prévue par la loi« . La robe noire réclame ainsi 10 millions pour le préjudice subi par sa cliente.

« Notre cliente a révélé à son père qu’elle a été agressée, son sac volé ainsi que ses bijoux en or à savoir une chaîne et des boucles d’oreilles qu’elle portait. Elle a un certificat médical de 16 jours à l’issue de cet incident« , selon Me Ndèye Fatou Touré.

1 an d’emprisonnement ferme…

La représentante du Procureur a requis 1 an d’emprisonnement ferme contre Ibou Thiaw pour le délit d’outrage public et attentat à la pudeur après sa relaxe pour collecte illicite de données à caractère personnel. Pour Moussa Diallo et Babacar Ndiaye, elle a sollicité, respectivement 2 et 5 ans de prison ferme. Par ailleurs, le ministère public a demandé une amende de 100 000 F pour chacun.

« Allez porter plainte contre Seydi Gassama…« 

Me Baba Diop de la défense des prévenu, a pointé du doigt Seydi Gassama qu’il accuse d’être la personne qui a publié sur le net la vidéo de Fatou Ndoye.

«Vous connaissez bien vos diffuseurs! On a vu Seydi Gassama qui dit avoir diffusé la vidéo. Allez porter plainte contre lui (…) On ne peut pas se constituer partie civile parce quand on est un incapable, on ne peut pas agir en justice. Son conseil a présenté un dossier médical attestant qu’elle a une défaillance mentale», souligne Me Diop qui demande au tribunal de déclarer irrecevable la constitution de partie civile de Fatou Ndoye.

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