Le Président tunisien Kais Saied a déclaré la guerre aux migrants subsahariens, qui sont coupables, à ses yeux, de « violences, de crimes et d’actes inacceptables » dans son pays. L’ambassadeur de la Tunisie en RDC fait lui état d’un cas de viol à Sfax pour justifier l’opprobre jeté sur ces migrants irréguliers.
Par conséquent, le Président tunisien souhaite que des mesures urgentes soient prises contre les « hordes de migrants clandestins », qui participent d’une « entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie ». Dans son délire, il pense que l’objectif de cette entreprise funeste pour le peuple tunisien, est de faire en sorte que le pays soit considérée comme un pays « africain seulement » et effacer ainsi son caractère « arabo-musulman ». Ces propos, au-delà d’être inédits de la part d’un chef d’État africain en exercice, ne sont que l’expression d’une haine des Noirs, que rien ne justifie.
En effet, le Président Saied a « oublié » qu’un Arabe peut être noir. Qu’un noir peut être musulman. Et surtout qu’un Arabe peut ne pas être musulman. La Tunisie est un pays africain et le restera quoiqu’il arrive, sauf à la plier pour la faire migrer vers un autre continent. En attendant, ce sont des terroristes que la Tunisie fait migrer.
Ces dernières années, le pays de Habib Bourguiba s’est distingué dans la production et l’exportation vers l’Europe de migrants et de terroristes. Le 14 juillet 2016, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, un Tunisien a foncé avec un camion dans la foule à Nice, faisant 86 morts. Le 29 octobre 2020, Brahim Aouissaoui, migrant de 21 ans qui venait d’arriver de Tunisie, égorge trois personnes dans la basilique de Nice. Le 23 avril 2021, Jamel Gorchene, un migrant tunisien de 36 ans arrivé illégalement en France, tue au couteau une policière au commissariat de Rambouillet. Personne en France, n’a appelé à la chasse aux Tunisiens, sauf quelques extrémistes qui appellent globalement à lutter contre le grand remplacement en mettant fin à l’immigration et en expulsant immédiatement tous les clandestins. Excusez du peu…
Il a enfin « oublié » que plus de 32 000 migrants, dont 18 000 Tunisiens, sont arrivés clandestinement en Italie en provenance de Tunisie en 2022, selon des chiffres officiels italiens. L’Italie n’a pas lancé une chasse aux Tunisiens, ni accusé les migrants tunisiens de vouloir modifier la composition démographique de sa population.
Le 17 décembre 2010, un jeune vendeur de fruits et légumes tunisien de 26 ans et répondant au nom de Mohamed Bouazizi se voit confisquer sa marchandise par des policiers. Il s’immole par le feu devant la préfecture de la ville de Sidi Bouzid. Depuis ce drame, qui a déclenché le printemps arabe et qui a précipité la fuite de Ben Ali, qu’est-ce que les différents gouvernements tunisiens ont entrepris pour retenir leurs propres compatriotes de partir à l’assaut des vagues, victimes qu’ils sont de la pauvreté, de la corruption et de l’incompétence d’une classe politique qui veut jeter le voile sur les vrais enjeux ? Avec près de 90% de taux d’abstention lors du second tour des législatives de janvier 2023, les Tunisiens ne font plus confiance à leur élite dirigeante et à leur système politique. Voilà une crise qui mérite des mesures urgentes.
L’année 2023 va être compliquée en Tunisie, notamment sur le plan économique. L’inflation a atteint 10% en 2022, avec une forte hausse des denrées de première nécessité, ainsi qu’une pénurie de sucre, de café ou encore de riz. Le pays attend avec impatience une perfusion de 1,7 milliard d’euros du FMI, qui exige en contrepartie des réformes structurelles avant de décaisser le moindre euro. Voilà une autre crise très sérieuse, qui mérite toute l’attention et toute l’énergie du Président Saied.
* Par Bocar Alpha Kane
Journaliste