Sénégal : L’intégralité de la décision du Conseil constitutionnel annulant le report de la présidentielle
RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL
CONSTITUTIONNEL
Vu la Constitution;
DÉCISION nº 1/C/2024
AFFAIRES n° 1/C/24 à 9/C/24
Demandeurs:
- SUR LA SAISINE:
- Mouhamed Ayib Salim DAFFÉ, Samba DANG et 38 autres députés;
- Babacar MBAYE et 16 autres députés;
- El Hadji Malick GAKOU,
- Cheikh Tidiane DIÈYE, Habib SY, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, El Hadji Mamadou DIAO, Thierno Alassane SALL et Daouda NDIAYE, candidats à l’élection présidentielle du 25 février 2024.
SÉANCE du 15 février 2024.
Vu les pièces des dossiers;
Vu la loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel;
Vu les lettres de notification des recours adressées le 9 février 2024 au Président de la République, au Président de l’Assemblée nationale et au Premier ministre, en application de l’article 14 de la loi organique susvisée;
Le rapporteur ayant été entendu;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
- Considérant que par requête enregistrée au greffe du Conseil constitutionnel le 8 février 2024, sous le numéro 8/C/24, les députés Mouhamed Ayib Salim DAFFÉ et Samba DANG, agissant en leur nom et au nom de 38 autres députés, ont saisi le Conseil constitutionnel d’un recours aux fins de faire « déclarer contraire à la Constitution la loi n° 4/2024 adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024 portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution« , d’ordonner la poursuite du processus électoral et « d’ajuster, si besoin, la date de l’élection présidentielle pour tenir compte des jours de campagne perdus« ;
- Considérant que par une autre requête enregistrée au greffe du Conseil constitutionnel le même jour, sous le numéro 9/C/24, le député Babacar MBAYE, agissant en son nom et au nom de 16 autres députés, a saisi le Conseil constitutionnel d’un recours tendant à faire « déclarer contraire à la Constitution la loi n° 4/2024 adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024 portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution« ;
- Considérant que par requêtes enregistrées sous les numéros 1/C, 2/C, 3/C, 4/C, 5/C, 6/C, et 7/C/2024, El Hadji Malick GAKOU, Cheikh Tidiane DIÈYE, Habib SY, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, El Hadji Mamadou DIAO, Thierno Alassane SALL et Daouda NDIAYE, candidats à l’élection présidentielle du 25 février 2024, ont saisi le Conseil constitutionnel aux fins de contester la légalité du décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024;
SUR LA COMPOSITION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL:
- Considérant que le Conseil constitutionnel, constatant l’absence d’un de ses membres, peut, conformément aux dispositions de l’article 23 de la loi organique n° 2016-23 du juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, valablement délibérer et statuer;
SUR LA JONCTION DES REQUÊTES:
- Considérant que les requêtes présentent un lien de connexité suffisant; qu’il y a lieu, pour une bonne administration de la justice, d’en ordonner la jonction et de statuer par une seule et même décision;
SUR LA COMPÉTENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL:
- Considérant que le périmètre de compétence du Conseil constitutionnel dans le contrôle de constitutionnalité des lois, est circonscrit, en matière de révision constitutionnelle, à la vérification du respect des conditions d’adoption, d’approbation et des limites temporelles et matérielles que la Constitution elle-même fixe à l’exercice des pouvoirs du constituant dérivé;
- Considérant que s’il est vrai que la Cour suprême est juge de l’excès de pouvoir des autorités exécutives, le Conseil constitutionnel, juge de la régularité des élections nationales, dispose d’une plénitude de juridiction en matière électorale, sur le fondement de l’article 92 de la Constitution; que cette plénitude de juridiction lui confère compétence pour connaître de la contestation des actes administratifs participant directement à la régularité d’une élection nationale, lorsque ces actes sont propres à ce scrutin;
- Considérant qu’il s’ensuit que le Conseil constitutionnel est compétent pour statuer sur les recours dirigés contre la loi constitutionnelle et le décret précités;
SUR LA RECEVABILITÉ:
- Considérant que les requêtes enregistrées au greffe du Conseil constitutionnel sous les n° 8/C/24 et 9/C/24, signées respectivement par plus du dixième des députés composant l’Assemblée nationale, sont introduites dans le délai prévu par l’article 74 de la Constitution; qu’elles contiennent, conformément à l’article 16 de la loi organique n° 2016- 23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, l’exposé des moyens et sont accompagnées de deux copies de la loi attaquée;
- Considérant qu’il ressort de la décision du Conseil constitutionnel nº 2/E/2024 du 20 janvier 2024 que les requérants, agissant contre le décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral, sont tous candidats à l’élection présidentielle du 25 février 2024; qu’ils justifient en conséquence d’un intérêt légitime à contester ce décret;
- Considérant qu’il en résulte que les requêtes sont recevables;
AU FOND
Sur les moyens tirés de la violation des articles 27, 103 de la Constitution et du principe de sécurité juridique, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens tendant à l’inconstitutionnalité de la loi:
- Considérant que les requérants soutiennent que la loi attaquée est contraire à la Constitution en ce qu’elle prolonge le mandat du Président de la République de 10 mois;
- Considérant que l’article 103 de la Constitution dispose que la durée du mandat du Président de la République ne peut faire l’objet de révision; que ce texte consacre l’intangibilité de la durée de 5 ans du mandat prévue à l’article 27 de la Constitution;
- Considérant que la juridiction constitutionnelle a déjà décidé, d’une part, que la durée du mandat du Président de la République ne peut être réduite ou allongée au gré des circonstances politiques, quel que soit l’objectif poursuivi; que le mandat du Président de la République ne peut être prorogé en vertu des dispositions de l’article 103 précité; que la date de l’élection ne peut être reportée au-delà de la durée du mandat; que d’autre part, la loi attaquée introduit dans la Constitution des dispositions dont le caractère temporaire et personnel est incompatible avec le caractère permanent et général d’une disposition constitutionnelle;
- Considérant que la loi attaquée dispose: « Article 1er: par dérogation à l’alinéa premier de l’article 31 de la Constitution aux termes duquel « le scrutin pour l’élection du Président de la République a lieu 45 jours francs au plus et 30 jours francs au moins avant la date de l’expiration du mandat du Président de la République en fonction », le scrutin pour l’élection présidentielle du 25 février 2024 est décalé au 15 décembre 2024. Article 2.- le Président de la République en exercice poursuit ses fonctions jusqu’à l’installation de son successeur.« ;
- Considérant, cependant, qu’en « décalant« la date de l’élection du Président de République au 15 décembre 2024 et en décidant que « le Président en exercice poursuit ses fonctions« jusqu’à l’installation de son successeur, la loi attaquée proroge la durée du mandat du Président de la République au-delà des 5 ans;
- Considérant, ainsi, que la loi attaquée est contraire aux dispositions des articles 27 et 103 de la Constitution et au principe à valeur constitutionnelle de sécurité juridique et de stabilité des institutions;
Sur la demande tendant à ordonner la poursuite du processus électoral:
- Considérant que les requérants soutiennent que l’article 34 de la Constitution ne prévoit le report du scrutin qu’en cas de décès, d’empêchement définitif ou de retrait d’un candidat, ce qui, selon eux, signifie que ni le Président de la République, ni le Parlement ne peuvent reporter une élection présidentielle; que seul le Conseil constitutionnel, juge de la régularité des élections nationales, y est habilité; qu’ils en concluent que c’est à tort que l’élection présidentielle a été reportée et sollicitent, en conséquence, la poursuite du processus électoral et, « si besoin est, l’ajustement de la date de l’élection présidentielle pour tenir compte des jours de campagne perdus« ;
- Considérant qu’au regard de l’esprit et de la lettre de la Constitution et de la loi organique relative au Conseil constitutionnel, le Conseil constitutionnel doit toujours être en mesure d’exercer son pouvoir régulateur et de remplir ses missions au nom de l’intérêt général, de l’ordre public, de la paix, de la stabilité des institutions et du principe de la nécessaire continuité de leur fonctionnement;
- Considérant que le Conseil constitutionnel, constatant l’impossibilité d’organiser l’élection présidentielle à la date initialement prévue, invite les autorités compétentes à la tenir dans les meilleurs délais;
Sur le défaut de base légale du décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral:
- Considérant que les requérants, candidats à l’élection présidentielle, sollicitent l’annulation du décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral, motif pris de ce qu’il manque de base légale, le Président de la République ne disposant pas du pouvoir de reporter ou d’annuler le scrutin;
- Considérant qu’il ressort du rapport de présentation du décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024, que le Président de la République s’est fondé sur la proposition de loi constitutionnelle portant dérogation à l’article 31 de la Constitution, pour abroger le décret n° 2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024;
- Considérant que la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée sous le n° 4/2024 par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024, est déclarée contraire à la Constitution; qu’en conséquence, le décret attaqué, pris sur le fondement de la proposition de loi notifiée au Président de la République, manque de base légale et encourt l’annulation,
DÉCIDE:
- Article premier. -Les requêtes sont recevables.
- Article 2. La loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée sous le n° 4/2024 par l’Assemblée nationale, en sa séance du 5 février 2024, est contraire à la Constitution.
- Article 3. Le décret n° 2024-106 du 03 février 2024 portant abrogation du décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024 est annulé.
- Article 4.– La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République du Sénégal.
Délibéré par le Conseil constitutionnel en sa séance du 15 février 2024, où siégeaient Monsieur Mamadou Badio CAMARA, Président, Madame Aminata Ly NDIAYE, Vice-présidente, Messieurs Mouhamadou DIAWARA, Youssoupha Diaw MBODJ, Madame Aw DIÈYE et Monsieur Cheikh Ahmed Tidiane COULIBALY, membres.
Avec l’assistance de Maître Ousmane BA, Chef du greffe.
Considérant N°14 ELECTION AVANT LE 02/04/2024 CLAIR ET NET HEIN !
Considérant N°14 …QUE LA DATE DE L’ELECTION NE DOIT PAS ETRE AU DELA DE LA FIN DU MANDAT ..Doncaster AVANT LE 02/04/2024 ! A bon entendeur SALUT
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On a interdit injustement des manifestations, malmené des manifestants et des journalistes, on a perdu des journées inutilement.
On a perdu des milliards inutilement.
Il suffisait aux chefs des FDS de dire directement la vérité au président qui compte sur eux pour passer par force.
Il faut revoir les curricula et la formations de nos FDS qui n’ont rien appris d’utile; sinon, ils nous auraient épargnés des dérives d’un apprenti directeur.
Ce que je dis est valable à tous dirigeants africains.
Bilahi. Nous n’avons pas de pays, ni de dirigeants, ni de juges, ni de FDS qui veulent plaire aux présidents. Honte