Pour une meilleure représentativité de la jeunesse du Sénégal dans les instances de décisions*

Excellence Monsieur le Président de la République,

C’est avec un grand honneur et plaisir que je vous adresse ces propos.

La jeunesse est le socle et l’espoir de demain. Faites confiance à votre jeunesse, responsabilisez-là, accompagnez-là, soutenez-là. C’est ça qui fait la fierté d’une nation. Il importe que les jeunes fassent partie des acteurs clés dans les assemblées de propositions et de prises de décisions et que leurs avis comptent. Ils doivent rejoindre les hautes instances comme l’Assemblée nationale, les institutions judicaires et certains services de l’exécutif même avec des profils de junior. C’est beau de faire des discours élogieux mais passons à l’œuvre car c’est le plus important. Vous avez certes une ambition pour votre jeunesse, mais parmi vos collaborateurs et représentants se trouvent des légions de politicards qui se servent de la politique et à des fins personnelles. Et cela change vraiment la donne.

La jeunesse sénégalaise regorge une multitude de compétences, de ressources humaines ingénieuses et très qualifiées. Je ne suis pas là pour vanter cette jeunesse mais pour simplement dire que les jeunes méritent d’être suivis et accompagnés de manière pérenne. Cette composante de votre population est très bien formée et très intelligente. De Dakar, en passant par Thiès, Bambey, Kaolack, Ziguinchor et sans oublier notre Sanar de Saint-Louis, pour ne citer que ceux-là, les années d’études dans les universités sénégalaises (publiques comme privées) constituent un vrai parcours de combattant et les jeunes qui en sortent restent souvent paumer et déboussoler.

Dans le monde de la diaspora aussi, votre vaillante jeunesse allie pour le plus souvent études et boulots, travaillant jours et nuits sans baisser les bras. Malgré certaines contraintes préfectorales, administratives et surtout financières, ces jeunes réussissent et se font respecter par leurs pairs car très pugnaces et sérieux. Ayant été concerné par cette partie de votre jeunesse, nous vous rassurons que les petits boulots, la galère administrative et pécuniaire auxquels font face les étudiants, ne les empêchent pas d’avancer et de persévérer. Avec toutes les difficultés que rencontre cette jeunesse de la diaspora, ces jeunes ne passent pas inaperçu en matière de réussite universitaire, dans la vie courante et avec de bonnes attitudes à adopter. Certains d’entre eux finissent leur cursus universitaire mais ont ce dilemme de retourner au pays natal par peur de tomber dans la recherche incessante de nouvelles opportunités. Facilitez-leur la tâche pour une intégration effective et durable dans le monde professionnel. Essayons de juguler la fuite des cerveaux et c’est toujours un réel bonheur de retrouver ses racines ou de travailler au service de son pays.

Dans les plus grandes démocraties, les jeunes constituent un pilier important dans les instances de décisions. Gabriel Attal, l’actuel porte parole du gouvernement français et Secrétaire d’Etat auprès du 1er ministre a 32 ans et est élu député lors des élections législatives de 2017 à l’âge de 28 ans. Le rwandais Patrick Nkuriza âgé de 19 ans travaille au sein du gouvernement de Paul Kagamé en tant que ministre des Nouvelles Technologies et du Développement même si il est considéré comme un surdoué pour certains. La namibienne, Emma Theofilus est devenue vice-ministre en charge des technologies de l’Information et de la Technologie à l’âge de 23 ans. De par cette fonction, elle siège à l’Assemblée nationale en qualité de députée. Beaucoup de jeunes dans le monde investissent les hautes institutions de leur République. Et c’est cela qui les forge à devenir de vrai leader.

Dans les assemblées des Nations unies que ce soit à Genève, New York ou autres représentations, nous percevons une nouvelle génération de jeunes de moins de 30 ans faisant partie de la représentation diplomatique de leur pays et qui sont responsabilisés. Cependant, on constate que la majorité des composantes de la représentation du Sénégal a approximativement 40 ans ou plus. Notre Sénégal ne manque pas de jeunes ingénieux et compétents, il suffit de les responsabiliser et de les épauler afin d’assurer une bonne relève pour que demain nos homologues ne soient pas en avance sur nous. La relève doit se préparer dés maintenant, encastrez votre jeunesse dans vos administrations et votre gouvernement. C’est de l’intérêt du Sénégal d’assurer une meilleure représentativité de sa jeunesse dans les instances de décisions et l’avenir nous le dira.

On ne peut pas comprendre au Sénégal ce phénomène inquiétant : des jeunes qui finissent leurs études à l’âge de 26 ou 29 ans et qui vont attendre l’âge de 40 ans ou plus pour trouver un poste qui réponde à leurs attentes, voire un travail décent. Cette partie de la population sénégalaise fait face à une pénurie d’horizons, d’avenir incertain et de doute pour leur lendemain. Accompagnez les jeunes et évitons la politisation des postes au profit d’un groupe souvent choisi selon des critères d’appartenances partisanes, ou proche d’un dignitaire du régime etc. La politisation persistante des postes et l’usurpation des fonctions constituent le fléau majeur qui gangrène l’insertion de la jeunesse et des jeunes diplômés.

Etant les futurs leaders, c’est un devoir pour nos dirigeants de bien préparer et de former les jeunes, de les associer à l’Ecclésia ou l’Agora, de leur apprendre à légiférer, à négocier, à se responsabiliser et à être de vrai patriote ancré des valeurs de l’amour de la patrie.

L’une des panacées de cette spirale infernale liée à la problématique de l’emploi des jeunes est la suivante : Mettez les hommes qu’il faut à la place qu’il faut sans partis pris. Et dans cette perspective, espérons-le, tout reviendra peut-être à la normale.

A quand va finir cet adage dans nos sociétés : il faut faire de la politique pour trouver un bon poste, être l’ami du politicien ou être un proche du pouvoir. L’emploi des jeunes est une priorité pour tout gouvernement souhaitant le développement. Il sera important de mobiliser les entreprises en faveur de ce pan de la société. A quoi servent les plateformes de la fonction publique si on perçoit qu’il n’y a jamais de suivi et de retour concernant nos candidatures antédiluviennes en dépit de maintes relances. L’apport de solutions innovantes dans le marché du travail est une nécessité car l’emploi des jeunes devient une urgence politique.

Récemment, des efforts ont été certes entamés pour le recrutement de 5000 enseignants, de 10000 jeunes par le Ministère de l’Environnement et du Développement durable, de 250 stadiers par le Ministère des Sports. Néanmoins, il serait très crucial aussi de recruter des jeunes pour qu’ils s’acclimatent dès maintenant des règles de fonctionnement institutionnel, des instruments et procédures des institutions exécutives, législatives et judiciaires et qu’ils puissent apprendre à défendre dignement les intérêts du Sénégal au niveau national et international.

Une révolution subite s’opère et dégénère quand la jeunesse perd tout espoir. Franck Thilliez n’avait pas tort lorsqu’il déclarait que : « L’espoir est ce qui nous fait avancer. Sans espoir, nous ne sommes rien ». Néanmoins, dans la vie, comme le martèle souvent le journaliste sénégalais Pape Djibril FALL faut jamais perdre espoir quelque soit la difficulté et j’y ajoute que tout viendra au bon moment. Bref, je confirme les sages assertions du Daron qui avait l’habitude de me dire : la persévérance et le sérieux finissent toujours par payer.

La répétition étant pédagogique, comme je l’ai dépeint dans mon précédent post : Il faut que l’on comprenne que la politique n’est pas un métier, c’est une fonction que l’on exerce et qui permet de rendre service à son pays. Dans son sens le plus noble, la politique devrait constituer un espace où les hommes incarneraient les bonnes valeurs d’honnêteté, d’éthique, de gestion transparente de la chose publique, de respect de la parole donnée, bref de vertu et de responsabilité etc. Cependant c’est tout à fait le contraire de nos sociétés modernes où les hommes politiques érigent l’intérêt personnel au devant de tout acte. Cela aussi reste un obstacle freinant les jeunes dans leur insertion professionnelle.

L’arrêt de la politisation des financements publics et l’accélération de l’emploi décent au profit de la jeunesse seraient la bienvenue et constitueraient un sacerdoce pour adoucir l’inactivité et le chômage des jeunes. Poussons nos élites et dirigeants à laisser de côté les gadgets politiques et à se mettre à l’essentiel pour assurer un Sénégal émergent et prospère. On vous le souhaite en tout cas mais pour cela, pensez bien à qui vous confiez vos missions de service public.

De nos jours, la plupart des hommes politiques pensent plus à comment maintenir ou conserver leur poste qu’à aider les jeunes. Dans cette logique, tous les moyens sont bons pour arriver à leurs fins. In fine, la jeunesse manque de plus en plus de références politiques. Loin de se concentrer sur leur travail, bon nombre d’hommes politiques passent maintenant une bonne partie de leur temps sur les réseaux sociaux afin de montrer une bonne image d’eux-mêmes et par ricochet de targuer leur mérite. Soyons humble car seul le travail dans l’humilité nous mènera loin.

Faisons le nécessaire pour une restauration de la moralisation de la vie publique et de la culture des valeurs patriotiques, civiques et humaines. Ce sont ces valeurs qui peuvent augurer de la grandeur d’une nation. Martin Luther King ne nous démentira pas lorsqu’il postulait que : « Nous avons besoin de leaders qui ne sont pas amoureux de l’argent, mais de la justice. Qui ne sont pas amoureux de la publicité, mais de l’humanité ».

Invitons nos acteurs politiques à une république des valeurs justes et équitables, à faire confiance aux jeunes et à les chapeauter. Laisser en rade sa jeunesse est la pire chose qu’un dirigeant puisse léguer à son pays.

La jeunesse sénégalaise est très battante. Donnez-lui sa chance, n’attendons pas que les jeunes soient déprimés ou paumés pour leur venir en aide. Nous ne voulons point de médecin après la mort.

Les longues promesses doivent être mises en œuvre. Les jeunes sont l’espoir de demain, si vous les esquiver, vous sacrifiez toute une génération. Poussez-les à s’engager et à s’occuper de la vie publique, invitez-les et donnez-leur les moyens. La démocratie participative et l’engagement des jeunes constituent un outil majeur en ce sens qu’ils leur permettent d’assurer un rôle primordial dans l’organisation, voire le bon fonctionnement de la société, et d’être un acteur central dans l’élaboration des processus décisionnels en proposant leurs idées et leurs façons d’organiser la cité.

Montrez la voie et donnez la voix à votre jeunesse. Faites d’elle l’un des acteurs dans l’élaboration du processus décisionnels au sein des institutions. L’importance de veiller à une meilleure représentativité des jeunes dans les instances de prise de décisions les incite à devenir des acteurs responsables et incontournables du développement de leurs pays. La participation des jeunes à la vie publique augure une certaine maturité et leur confère le pouvoir de prendre leur destin en main et faire d’eux des leaders en devenir.

L’implication active des jeunes dans les institutions nationales et internationales leur permet de pouvoir influer sur le fonctionnement, voire la bonne organisation des administrations étatiques.

Par ailleurs, la jeunesse, relève de demain doit dès à présent développer les bases d’une bonne gouvernance en prônant dans leurs actions la démocratie, le respect de l’Etat de droit, la transparence dans la gestion de la chose publique, le contrôle de la corruption, le respect des ainés et de la hiérarchie, entre autres pour ainsi assurer l’évolution d’un monde meilleur et garantir le développement durable. Pour faciliter cela, la jeunesse a besoin de repères, de modèles d’hommes politiques et d’hommes d’Etats.

Et pour finir, je dirai qu’il nous appartient, nous jeunes du Sénégal et de sa diaspora, de participer non seulement au rayonnement, à l’avancée de la solidification de nos institutions mais aussi à la valorisation et la promotion d’une culture démocratique intériorisée, au plein respect des droits humains, et une société plus juste et plus équitable pour le bien de l’humanité.

Je vous prie d’agréer, Excellence Monsieur le Président de la République, mes salutations les plus distinguées.
*Arona DIOP
Analyste politique, Diplômé des sciences
politiques et des relations internationales
aronadiop10@gmail.com

1 COMMENTAIRE
  • Dr.Thiam

    Bravo mon ami et frère Arona tu as tout dit et j’espère que ça ne tombera pas dans l’oreille d’un sourd , ou devrais je dire j’espère que les autorités concernées pourront lire ce texte et en tirer le sens et la quintessence qu’il faut pour amorcer ce changement révolutionnaire qui n’est rien d’autre que de responsabiliser la jeunesse consciente engagée et compétente de ce pays pour un Sénégal meilleure!

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