Le président de la République, Macky Sall va prononcer, ce lundi 03 avril, son traditionnel message à la Nation, à l’occasion de la célébration du 63e anniversaire de l’Indépendance du Sénégal. Une occasion pour le journaliste d’investigation, Pape Alé Niang d’interpeller le chef de l’Etat sur plusieurs sujets.
Texte in extenso :
Monsieur le Président, le 3 Avril, à la veille de la fête de l’indépendance, comme il est de coutume, vous allez vous adresser à la nation. Un discours sur le principe consacré à l’armée et à la jeunesse.
Ce discours sera livré dans un contexte tendu et lourd tant tous les sénégalais sincères et honnêtes s’inquiètent du devenir de notre chère nation. La preuve, la peur qui s’est emparée de tous les Sénégalais dans tous les secteurs lors d’un banal procès de diffamation opposant Mame Mbaye Niang, votre protégé, et Ousmane Sonko, votre opposant le plus radical. Pendant deux jours, Dakar, poumon de notre économie, était à l’arrêt.
L’économie en a pâti gravement. Les rues n’étaient occupées que par les forces de défense et de sécurité. Un déploiement qui rappelle celui des Israéliens, vos amis, sur la bande de Gaza. Jamais dans l’histoire politique du Sénégal, le peuple n’a connu cette forme de terreur qui choque et écœure. Aucun Sénégalais ne pouvait présager que votre règne prendrait cette forme abjecte de gouvernance.
Le Sénégal est sous le règne de la fermeture, de l’injustice et de l’autoritarisme. Et M. le Président vous ne faites preuve d’aucune empathie à l’endroit de votre peuple, surtout sa jeunesse. Une jeunesse qui retient de vous une capacité extraordinaire d’emprisonnement. Plus de 400 jeunes croupissent en prison pour des broutilles. Un record mondial détenu par notre pays.
Désormais les prisons constituent le 47e département du Sénégal. Sous votre règne, tout le monde est en sursis. Vous pouvez vous targuer d’un bilan immatériel extraordinaire et pourtant les Sénégalais souffrent dans leur chair car ils n’ont pas la paix et la quiétude pour jouir de ce bilan. Seul votre camp, clan, famille, partisans jouissant d’une impunité scandaleuse au point de décrédibiliser les institutions sont en paix au Sénégal.
Le 4 avril vous allez trôner majestueusement à la place de la nation, place de l’obélisque pour suivre le défilé. À coup sûr, certains souvenirs ne vont pas vous déranger. Car c’est sur cette place de l’obélisque que vous connaissez très bien que Mamadou Diop a été tué parce qu’il combattait le 3ème mandat à vos côtés. Un 3ème mandat que vous nourrissez le secret espoir de briguer.
Êtes-vous prêt M. le Président à marcher sur des cadavres pour assouvir ce désir ? Les Sénégalais n’en doutent point. Car déjà le bilan lourd est de 19 morts, zéro coupable. Aucune commission d’enquête. Des morts de plus ne vont outre mesure certainement pas vous déranger. C’est le propre des régimes répressifs qui ont déjà goûté au sang de leur peuple. Mais un fait est historique : aucun président, dictateur ou non, n’a jamais triomphé devant la volonté populaire. D’ailleurs, ceux qui ont les destins les plus tragiques avaient les forces de défense et de sécurité les mieux armées. M. le Président, il n’est jamais trop tard pour retrouver ce peuple qui vous a adulé un soir de 2012 et qui vous a tout donné en si peu de temps. C’est vous qui nous disiez qu’il y a une vie après le pouvoir.
Vos détracteurs disent que votre parole n’est pas stable tant votre gouvernance est parsemée de reniements.
Le peuple sénégalais espère qu’au moins pour une fois vous allez respecter votre parole. Car c’est la marque de fabrique des vrais hommes d’Etat. Finir votre mandat et rendre le tablier au prochain Président choisi librement par les Sénégalais. Vous serez au panthéon malgré tout ce que vous avez fait endurer au peuple sénégalais.