Babacar Touré met un terme à sa carrière: « C’est le bon moment, J’ai gagné partout où je suis passé »

Un an et quatre mois depuis le dernier match officiel de Babacar Touré. Le 30 octobre 2019, face aux Roumains de Sibiu en FIBA Europe Cup, le pivot de Fribourg Olympic était sorti prématurément sur blessure. Verdict: rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche. À l’époque, il ne se doutait pas qu’il s’agirait de son ultime apparition sur un terrain de basket.

Joint par téléphone, le Sénégalais révèle avoir pris la décision de tirer un trait sur sa carrière professionnelle. «C’est le bon moment», pose-t-il d’un ton serein.

Le choix est mûrement réfléchi. Touré s’était laissé le temps nécessaire pour faire le point sur son avenir. Désireux de se reconstruire physiquement et tester sa motivation, il avait décliné une offre de prolongation à Fribourg puis quitté le club en juin dernier. «Je voulais mériter mon contrat», tonne-t-il.

Huit mois plus tard, ses interrogations ont trouvé leurs réponses. Incertain de retrouver la pleine possession de ses moyens à 35 ans, il a préféré dire stop. Les propositions venues de Suisse, pour la plupart, et de l’étranger ne l’ont pas fait vaciller: «Après une telle blessure, je n’avais aucune garantie de revenir à mon meilleur niveau. Et je souhaitais aussi prendre du temps pour profiter de ma famille.»

«C’est dommage qu’il arrête comme ça, réagit Petar Aleksic, son mentor à Fribourg. Babacar a un corps solide. Il aurait pu revenir au jeu mais pour lui, c’était seulement à condition d’être à 100%. Je suis très triste, mais il part en vainqueur.»

Un palmarès XXL

Reste le souvenir d’une carrière riche en titres comme en émotions. «Je suis très satisfait de ce que j’ai accompli. J’ai gagné partout où je suis passé, j’ai joué la Ligue des champions avec Fribourg ainsi qu’une Coupe du monde et une Coupe d’Afrique avec le Sénégal. J’ai vécu des moments incroyables.»

Sur le plan individuel, Babacar Touré s’est imposé comme une figure de la Swiss Basketball League. L’amour dure trois ans, paraît-il. Entre le Sénégalais et la Suisse, on ne compte plus, tant il s’est installé dans le paysage sportif national. «Il est le plus Suisse des joueurs étrangers», plaisante Manu Schmitt, son entraîneur à Union Neuchâtel de 2013 à 2016.

De Bernex (2007-2010, en LNB) à Fribourg (2017-2020) en passant par les Lions de Genève (2010-2013), Neuchâtel (2013-2016) et Vevey (2016-2017, LNB), Touré a effectué la totalité de son parcours professionnel au sein de nos contrées. Une exception dans un championnat où les meilleurs s’éternisent rarement plus de quelques mois. À la clé: trois titres de champion (2013, 2018 et 2019), trois Coupes de Suisse (2013, 2014, 2018) et trois Coupes de la Ligue (2013, 2014, 2018). Il a également été élu MVP étranger à deux reprises (2015, 2016) et une fois MVP de la finale (2018).

«C’est un joueur qui change totalement une équipe»

Petar Aleksic, entraîneur de Babacar Touré à Fribourg Olympic de 2017 à 2020

Au-delà du palmarès, ses statistiques personnelles en SBL illustrent sa domination: 14,9 points de moyenne, 9,5 rebonds, 62,5% au tir (dont 33,7% à trois points) et 76,5% aux lancers francs. «Il était d’une efficacité et d’une régularité impressionnantes», témoigne Manu Schmitt. «C’est un joueur qui change totalement une équipe», poursuit Petar Aleksic.

Le technicien bosno-suisse a justement articulé son Fribourg autour de ce pivot de 2,05 m. Avec la réussite que l’on connaît (deux titres de champion, deux Coupes de Suisse, une Coupe de la Ligue et deux qualifications pour la Ligue des champions). «Il était le cœur de l’équipe, le commandant de la défense», rappelle Aleksic. Ce n’est pas pour rien s’il avait été nommé capitaine et surnommé le «général» au sein du groupe.

Futur agent de détention

De toute évidence, Babacar Touré constituait un talent surdimensionné pour la Suisse. «Il aurait pu évoluer en Euroleague, il en avait le niveau, soutient l’entraîneur de FR Olympic. S’il avait été encadré plus jeune, il aurait peut-être réalisé une autre carrière.» Sous-entendu, à l’étranger.

Ce ne sont pourtant pas les occasions qui ont manqué. Si certaines l’ont parfois fait hésiter, Touré est à chaque fois resté fidèle au basket helvétique. Non pas par manque d’ambition mais afin de rester proche de sa compagne, rencontrée en Suisse.

Symbolique de la mentalité du garçon, loyal et intègre. «Il a acquis le respect de tout le monde parce que c’est un énorme bosseur, témoigne Petar Aleksic. Ce n’était pas le meilleur techniquement, mais il travaillait tellement qu’il rendait les autres meilleurs. C’est un gars de confiance et un exemple.» Même son de cloche du côté de Manu Schmitt: «Il faisait le ciment entre tout le monde, les jeunes, les vieux, les étrangers, les Suisses… Babacar a toujours été respecté car il ne trichait pas.»

«Babacar a toujours été respecté car il ne trichait pas»

Manu Schmitt, entraîneur de Babacar Touré à Union Neuchâtel de 2013 à 2016

Touré manque déjà à la SBL. Sa retraite va laisser un vide difficile à combler. L’inverse est moins vrai car l’intéressé ne compte pas s’accrocher au monde du basket. Sa reconversion est déjà toute trouvée, il se prépare à devenir agent de détention. «J’ai toujours été attiré par l’aspect sécuritaire. Mon père était gendarme, mon oncle militaire. J’ai grandi là-dedans», justifie-t-il sans vouloir s’épancher sur le sujet.

De commandant de la défense à gardien de l’ordre. Changement de vie, mais pas de responsabilités.

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Avec tdg.ch

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